En toute hypothèse (épisode 100)

en toute hypothÈSE (épisode 100)


Une fois où on allait voir mon oncle en prison, ma tante me disait qu’elle avait vu Béatrice Dalle dans la salle d’attente du parloir, surpris, je me demandais ce qu’elle pouvait bien faire là-bas… Après renseignement pris, elle s’était éprise pour un prisonnier lors d’un tournage, alors peut-être que je la verrai aussi, surtout que je venais d’aller voir au cinéma le film qu’elle avait sorti avec Disiz la peste, « Dans tes rêves » où elle jouait une productrice de rap. Le destin peut-être me disais-je et ça ne loupait pas ! Arrivé avec ma grand-mère, elle s’asseyait juste à côté de nous, et comme on la voyait extravagante à la TV, là c’était pareil… Elle commençait à discuter avec nous et ma grand-mère qui n’était pas née de la dernière pluie nous avait entendu parler ma tante et moi, alors pour mettre toute les chances du côté de son petit fils, elle parlait avec Béatrice Dalle, une conversation lunaire mais trop marrante.

– Vous êtes de quelle origine Madame ?

– De l’Algérie.

– Ah bah j’en viens, on est allé présenter le film à Alger, c’était superbe.

– Bah la prochaine fois que tu viens en Algérie, tu viens chez moi, tu es la bienvenue ma fille.

– Ah, mais c’est super gentil Madame.

– Tu habites où ?

– A Paris. Et vous ?

– Moi, à Rosny-sous-Bois, il faut venir chez moi je vais te faire un bon couscous…

Surréaliste, mais tellement bon…

Ensuite, après que ma grand-mère lui ait dit que j’étais un « écrivain » nous conversions tous les deux.

– Ah, tu fais du rap, et bien il faut me donner une maquette !

– Ok, très bien, tu es là vendredi ?

– Oui, je viendrai sûrement.

– Alors je te ramènerai ça…

Et le vendredi suivant, nous nous sommes revus et je lui passais un CD, mais pas vraiment sûr de la qualité, c’était un réenregistrable.

– Ok, j’écoute ça, et la semaine prochaine quand je reviens je t’en dirais plus.

La semaine d’après, on se revoyait et le CD n’était pas passé, elle n’avait pas réussi à l’écouter, ni chez elle, ni dans le studio d’un pote à elle.
La malédiction continuait !!!

– Il faudrait que tu m’en repasses un, mais cette fois il faudrait être sûr qu’il passe…

Mais c’était bel et bien la dernière fois que je la voyais…

Après plusieurs va-et-vient à la maison d’arrêt, ma grand-mère avait dans la tête de m’emmener en Algérie. Elle y avait fait construire une immense maison mais très peu de personnes de la famille y mettaient les pieds, alors après 19 ans sans retourner sur la terre de mes ancêtres, je sautais le pas. La seule fois où j’y avais été c’était en 1986 et j’avais encore quelques souvenirs, mon grand-père allongé sur le sendari, les nuits sur le toit de la maison à dormir à la belle étoile avec toute ma famille…
Mais là j’étais devenu un homme et ma grand-mère était fière de m’emmener avec elle. Nous arrivions et j’étais reçu comme un roi par une famille au grand coeur, qui n’a pas grand chose et qui veut tout donner, reçu aussi par des voisins en or, qui me donnais l’impression qu’ils me connaissaient depuis des siècles et se mettaient en 4 pour que mon séjour se passe à merveille.
Là-bas aussi j’écrivais, un titre « Blady » qui allait faire parti de mon futur album. Les gens que je cotoyais à Fillaoucene (mon village) étaient simples, d’une gentillesse monstre, et c’est là-bas que je me suis rendu compte pour la première fois de ma vie, que nous avions une chance énorme de vivre en France, que nous pouvions entreprendre des études, ouvrir des commerces, avoir des aides et que les rêves étaient possibles même s’il fallait quand-même se donner la peine de les réaliser. Mais dans mon village je me demandais comment toute cette jeunesse pourrait s’en sortir, se marier et construire un futur, puisque tout est cher et qu’il n’y a pas de travail pour tout le monde.
Moi qui avait pris pas mal la grosse tête avec la radio et le si peu de reconnaissance que j’avais, j’avais pris une gifle monumentale. J’étais aussi allé sur la tombe de mon grand-père sur laquelle un arbre avait poussé et lui faisait de l’ombre, la même ombre qui l’affectionnait tant à la cité, tout près du banc. J’entendais dans le village les appels à la prière des différentes mosquée qui jallonnaient les rues, prenais des goûters qui étaient des festins avec la famille sur la terrasse du château que ma grand-mère avait fait réaliser. Après 2 semaines à quelques encablures de nedroma je repartais le cœur lourd de laisser tous ses cousins avec qui j’avais passé du bon temps et auxquels je m’étais attaché.

en toute hypothÈSE (épisode 100)


Une fois où on allait voir mon oncle en prison, ma tante me disait qu’elle avait vu Béatrice Dalle dans la salle d’attente du parloir, surpris, je me demandais ce qu’elle pouvait bien faire là-bas… Après renseignement pris, elle s’était éprise pour un prisonnier lors d’un tournage, alors peut-être que je la verrai aussi, surtout que je venais d’aller voir au cinéma le film qu’elle avait sorti avec Disiz la peste, « Dans tes rêves » où elle jouait une productrice de rap. Le destin peut-être me disais-je et ça ne loupait pas ! Arrivé avec ma grand-mère, elle s’asseyait juste à côté de nous, et comme on la voyait extravagante à la TV, là c’était pareil… Elle commençait à discuter avec nous et ma grand-mère qui n’était pas née de la dernière pluie nous avait entendu parler ma tante et moi, alors pour mettre toute les chances du côté de son petit fils, elle parlait avec Béatrice Dalle, une conversation lunaire mais trop marrante.

– Vous êtes de quelle origine Madame ?

– De l’Algérie.

– Ah bah j’en viens, on est allé présenter le film à Alger, c’était superbe.

– Bah la prochaine fois que tu viens en Algérie, tu viens chez moi, tu es la bienvenue ma fille.

– Ah, mais c’est super gentil Madame.

– Tu habites où ?

– A Paris. Et vous ?

– Moi, à Rosny-sous-Bois, il faut venir chez moi je vais te faire un bon couscous…

Surréaliste, mais tellement bon…

Ensuite, après que ma grand-mère lui ait dit que j’étais un « écrivain » nous conversions tous les deux.

– Ah, tu fais du rap, et bien il faut me donner une maquette !

– Ok, très bien, tu es là vendredi ?

– Oui, je viendrai sûrement.

– Alors je te ramènerai ça…

Et le vendredi suivant, nous nous sommes revus et je lui passais un CD, mais pas vraiment sûr de la qualité, c’était un réenregistrable.

– Ok, j’écoute ça, et la semaine prochaine quand je reviens je t’en dirais plus.

La semaine d’après, on se revoyait et le CD n’était pas passé, elle n’avait pas réussi à l’écouter, ni chez elle, ni dans le studio d’un pote à elle.
La malédiction continuait !!!

– Il faudrait que tu m’en repasses un, mais cette fois il faudrait être sûr qu’il passe…

Mais c’était bel et bien la dernière fois que je la voyais…

Après plusieurs va-et-vient à la maison d’arrêt, ma grand-mère avait dans la tête de m’emmener en Algérie. Elle y avait fait construire une immense maison mais très peu de personnes de la famille y mettaient les pieds, alors après 19 ans sans retourner sur la terre de mes ancêtres, je sautais le pas. La seule fois où j’y avais été c’était en 1986 et j’avais encore quelques souvenirs, mon grand-père allongé sur le sendari, les nuits sur le toit de la maison à dormir à la belle étoile avec toute ma famille…
Mais là j’étais devenu un homme et ma grand-mère était fière de m’emmener avec elle. Nous arrivions et j’étais reçu comme un roi par une famille au grand coeur, qui n’a pas grand chose et qui veut tout donner, reçu aussi par des voisins en or, qui me donnais l’impression qu’ils me connaissaient depuis des siècles et se mettaient en 4 pour que mon séjour se passe à merveille.
Là-bas aussi j’écrivais, un titre « Blady » qui allait faire parti de mon futur album. Les gens que je cotoyais à Fillaoucene (mon village) étaient simples, d’une gentillesse monstre, et c’est là-bas que je me suis rendu compte pour la première fois de ma vie, que nous avions une chance énorme de vivre en France, que nous pouvions entreprendre des études, ouvrir des commerces, avoir des aides et que les rêves étaient possibles même s’il fallait quand-même se donner la peine de les réaliser. Mais dans mon village je me demandais comment toute cette jeunesse pourrait s’en sortir, se marier et construire un futur, puisque tout est cher et qu’il n’y a pas de travail pour tout le monde.
Moi qui avait pris pas mal la grosse tête avec la radio et le si peu de reconnaissance que j’avais, j’avais pris une gifle monumentale. J’étais aussi allé sur la tombe de mon grand-père sur laquelle un arbre avait poussé et lui faisait de l’ombre, la même ombre qui l’affectionnait tant à la cité, tout près du banc. J’entendais dans le village les appels à la prière des différentes mosquée qui jallonnaient les rues, prenais des goûters qui étaient des festins avec la famille sur la terrasse du château que ma grand-mère avait fait réaliser. Après 2 semaines à quelques encablures de nedroma je repartais le cœur lourd de laisser tous ses cousins avec qui j’avais passé du bon temps et auxquels je m’étais attaché.